Dynamique du recrutement de l’enzyme de réparation de l’ADN OGG1 à la chromatine endommagée suite à un stress oxydant

Nos cellules sont constamment exposées aux espèces réactives de l’oxygène qui peuvent induire des lésions sur l’ADN et compromettre ainsi la stabilité des génomes nucléaire et mitochondrial et sont à l’origine de plusieurs maladies humaines telles que le cancer ou les maladies neurodégénératives.

L'ADN glycosylase OGG1 supervise la détection et l'élimination de la 7,8-dihydro-8-oxoguanine (8-oxoG), qui est une des bases oxydées la plus fréquemment induite par le stress oxydant. Cette lésion très mutagène a peu d’effet sur la structure native de l’ADN et sa détection nécessite une inspection minutieuse des bases par OGG1 via un mécanisme qui n'est que partiellement compris.

Des chercheurs du CBM, en collaboration avec les équipes de Sébastien Huet (IGDR, Université de Rennes) et d’Anna Campalans (IRCM, CEA-Fontenay-aux-Roses), ont caractérisé ce processus grâce à une complémentarité d’approches allant de l’analyse biochimique de l’interaction entre OGG1 et l’ADN à l’imagerie de cellules vivantes exprimant OGG1 marqué par fluorescence. Les données obtenues mettent en évidence le rôle essentiel de résidus conservés d’OGG1 contactant la 8-oxoG ou le brin d’ADN adjacent, dans le processus de détection et d’accumulation des lésions. La dynamique d'OGG1 a été suivie dans le noyau de cellules humaines en situation basale et après l’induction de la 8-oxoG par micro-irradiation laser. Il a été observé que OGG1 échantillonne constamment l'ADN en alternant rapidement entre la diffusion dans le nucléoplasme et de courts transits sur l'ADN. Le processus d'échantillonnage est étroitement régulé par le résidu conservé G245 qui est crucial pour le recrutement rapide d'OGG1 sur les lésions oxydatives induites par micro-irradiation laser. De plus, les résidus Y203, N149 et N150, impliqués dans les premiers stades de la recherche de la 8-oxoG, régulent de façon différentielle l’identification de la lésion et le recrutement de la protéine de réparation sur les lésions oxydatives.

Ostiane D’Augustin, Virginie Gaudon, Capucine Siberchicot, Rebecca Smith, Catherine Chapuis, Jordane Depagne, Xavier Veaute, Didier Busso, Anne-Marie Di Guilmi, Bertrand Castaing, J Pablo Radicella, Anna Campalans, Sébastien Huet
Identification of key residues of the DNA glycosylase OGG1 controlling efficient DNA sampling and recruitment to oxidized bases in living cells
Nucleic Acids Research, 2023;, gkad243, https://doi.org/10.1093/nar/gkad243

Contact : bertrand.castaing@cnrs-orleans.fr

Le Chardon Marie, un extrait de plante aux vertus médicinales prometteuses pour la prise en charge « naturelle » du psoriasis

Face à l’efficacité mitigée et la toxicité des traitements médicamenteux contre le psoriasis de nouvelles stratégies thérapeutiques sont nécessaires.

Des chercheurs du CBM ont mis au point une stratégie de criblage de plantes médicinales, basée sur l’activation de la voie de signalisation dépendante du TGFb et du microARN-21, dans les cellules de l’épiderme. Cet axe de régulation est essentiel au maintien de l’intégrité de la peau et joue un rôle clé dans l’étape de réépithélialisation ou de remodelage cutané.

Grâce à ce criblage fonctionnel, 3 extraits de plantes ont été identifiés dont la Silymarine, un mélange de 8 flavonolignanes extrait de la plante Chardon Marie. Le séquençage à haut débit du transcriptome (RNA-seq) des kératinocytes a permis de mettre en évidence trois signatures moléculaires majeures associées à la différenciation, le cycle cellulaire et au métabolisme des lipides.

Les études mécanistiques ont révélé que la Silymarine bloque le cycle cellulaire et la différenciation des kératinocytes via l’inhibition de l’expression de Notch3, active la synthèse des lipides en stimulant l’activité transcriptionnelle de PPARγ et inhibe les réponses inflammatoires en bloquant l’activité transcriptionnelle de NF-ƙB. L'application topique de la silymarine sur des peaux de souris mimant le psoriasis s’est avérée suffisante pour atténuer le développement de lésions psoriasiformes en corrigeant l'expression altérée des marqueurs inflammatoires et ceux impliqués dans la différenciation et le métabolisme des lipides des keratinocytes.

Cet extrait de plante pourrait par conséquent représenter une alternative prometteuse « naturelle » aux traitements pharmacologiques actuels pour la prise en charge du psoriasis.


Elodie Henriet,Florence Abdallah, Yoan Laurent, Cyril Guimpied, Emily Clement, Michel Simon, Chantal Pichon and Patrick BarilTargeting TGF-β1/miR-21 Pathway in Keratinocytes Reveals Protective Effects of Silymarin on Imiquimod-Induced Psoriasis Mouse ModelVolume 3, ISSUE 3, 100175, May 2023 - DOI:https://doi.org/10.1016/j.xjidi.2022.100175

Travaux réalisés dans le cadre du projet « ValBioCosm » financé par le programme Cosmétosciences ARD 2021 (Ambition Recherche et Développement).

Vingt-sept recommandations de l’ANSES

J.-M. Bonmatin est un des 8 rédacteurs du groupe de travail du Conseil Scientifique de l’ANSES ayant travaillé sur la crédibilité de l’expertise scientifique de l’agence.

Ce rapport de 134 pages, intitulé « Crédibilité de l’expertise scientifique : enjeux et recommandations », est accessible sur https://www.anses.fr/fr/system/files/AVIS-et-RAPPORT-CS-GT-Credibilite-de-lexpertise.pdf.

Vingt-sept recommandations fortes sont issues de ce rapport pour améliorer la crédibilité de l’Anses dans un contexte particulièrement sensible, comme par exemple pour les pesticides. Ces recommandations sont une base de progrès indispensable et fournissent aussi une stratégie d’amélioration pour l’intégration des OGM dans les compétences futures de l’Anses.

L’Anses a fait valoir son point de vue dans une note de positionnement consultable sur https://www.anses.fr/fr/content/note-anses-sur-avis-cs-credibilite-de-lexpertise.

Dans les média : Le Monde, France Info, Libération, L’Express, Le Quotidien du Médecin, etc.

J.-M. Bonmatin coauteur du rapport EXPOSOME de l’ANSES (mars 2023)

J.-M. Bonmatin est un des 7 rédacteurs du groupe de travail du Conseil Scientifique de l’ANSES ayant travaillé sur la prise en compte de l’exposome pour les évaluations des risques.

Ce rapport de 197 pages est accessible sur https://www.anses.fr/fr/system/files/AUTRE2022METH0197Ra.pdf.

Représentation en 4 modules de l’étude de l’exposome illustrés par quelques exemples : de l’écosystème, origines des expositions, aux réponses biologiques et effets sur la santé en passant par les niveaux d’expositions externes, internes. La bulle temporelle souligne que l’exposome étudie les expositions sur la vie entière. Les flèches indiquent les relations entre les différents modules.

 

Les auteurs proposent la définition de l’exposome suivante : « L’exposome correspond à la totalité des expositions néfastes comme bénéfiques à des agents chimiques, biologiques et physiques, en interaction avec le statut physiologique, le milieu de vie et le contexte psycho-social, que connaît un organisme vivant de sa conception jusqu’à la fin de sa vie, afin d’expliquer son état de santé. » Les différents types de dangers qui peuvent se combiner sont principalement : les agents chimiques, les agents physiques, les polluants de l’air, les agents biologiques les nano et fibres ainsi que les déterminants sociaux. Le rapport détaille nombre de recommandations au travers d’exemples variés comme la problématique des travailleurs et des déchets, la qualité de l’air, le pesticide chlordécone, des outils numériques et la santé des enfants et adolescents, etc.

La spectroscopie Raman capable de détecter des biomolécules sous la surface de Mars

Chlorophylline, bêta-carotène, mélanine, chitine, cellulose, naringénine et quercétine : ces composés aux consonances exotiques sont des biomolécules permettant à certains organismes de résister à des conditions environnementales extrêmes. Ils constituent ainsi des cibles privilégiées pour la recherche de vie sur Mars. Afin d’évaluer leur résistance aux conditions martiennes, une expérience nommée BIOMEX, pour BIOlogy and Mars EXperiment, a été menée à l’extérieur de Station Spatiale Internationale (ISS).

Les molécules ont été mélangées à des analogues de sol Martien avant d’être exposées au rayonnement solaire à l’extérieure de l’ISS pendant 469 jours. De retour sur Terre, ils ont rejoint le Centre Aérospatial Allemand (DLR) de Berlin pour être analysés par spectroscopie Raman.

La spectroscopie Raman permet de déterminer la composition moléculaire et minéralogique d’un échantillon. Compatible avec les missions spatiales robotiques, elle fait partie des techniques clés pour l’exploration de Mars et la recherche de traces de vie. Le rover Perseverance de la NASA qui sillonne actuellement le cratère Jezero est équipé de deux instruments de ce type et la future mission ExoMars de l’ESA utilisera également un spectromètre Raman pour détecter de possibles biosignatures sur Mars à l’horizon 2030.

L’expérience BIOMEX a impliquée de nombreux chercheurs, dont les membres de l’équipe Exobiologie du CBM. Les résultats, publiés dans la revue Science Advances, révèlent que ces biomolécules résistent bien aux conditions de Mars ; les minéraux composant le sol Martien ayant un effet protecteur contre les UV. Plus important, l’étude montre que ces molécules pourraient être identifiées sans difficulté sur Mars par spectroscopie Raman.

Biosignature stability in space enables their use for life detection on Mars
Mickael Baqué,Theresa Backhaus et al.
Science Advances, Vol 8 -DOI: 10.1126/sciadv.abn7412

Environnement géologique de l’origine de la vie et questions ouvertes sur son émergence

L'origine de la vie est l'une des questions les plus fondamentales de l'humanité. Elle est abordée par un large éventail de chercheurs de différents domaines, avec des approches et des idées différentes quant à la façon dont elle est apparue. Cependant, ce qui manque aux expériences de chimie prébiotique, ce sont des informations précises sur l'environnement et les conditions régnant sur la Terre primitive à l'ère Hadéenne (4,5-4,0 Ga). En particulier, il y a un manque de connaissance sur les ingrédients inorganiques qui étaient disponibles, la stabilité et la longévité des divers environnements suggérés comme lieux d'émergence de la vie, ainsi que la cinétique et la fréquence des étapes prébiotiques ayant conduit aux premiers systèmes vivants.

Cette contribution passe en revue notre compréhension actuelle de la géologie de la Terre primitive à l'époque où la vie a émergé. Après avoir décrit le scénario géologique, nous évoquons les questions encore ouvertes sur l'origine de la vie : la vie a-t-elle commencé organiquement ou sous forme minéralogique ? Si organiquement, quelle était l'origine des constituants organiques de la vie ? Qu'est-ce qui est venu en premier, le métabolisme ou la réplication ? Quelle a été l'échelle de temps pour l'émergence de la vie? Nous concluons que la voie à suivre pour la chimie prébiotique est une approche fusionnant géologie et chimie, c'est-à-dire des cycles de réactions loin de l'équilibre se produisant de manière répétée et itérative sur des surfaces minérales dans des conditions hydrothermales.

Setting the geological scene for the origin of life and continuing open questions about its emergence
Frances Westall1, André Brack, Alberto G. Fairén and Mitchell D. Schulte
Frontiers in Astronomy and Space Sciences - 05 January 2023 - Volume 9 - doi : 10.3389/fspas.2022.1095701 9:1095701

Bispidines et manganèse : un couple gagnant

Etant un métal essentiel pour la vie et un très bon agent de relaxation, le Mn2+ a un grand potentiel pour remplacer le Gd3+, dont l’innocuité a été mise en question. Dans l’objectif d’assurer la complexation stable et inerte du Mn2+, le groupe « Complexes métalliques et IRM » du CBM et leurs collaborateurs à l’Université de Heidelberg en Allemagne ont créé un chélateur sélectif au Mn2+. Cette molécule contient quatre pyridines et un carboxylate en position de coordination sur une bispidine et possède une structure hautement rigide et préorganisée, parfaitement adaptée à la taille du Mn2+. Au-delà d’une stabilité thermodynamique, le nouveau ligand L confère au complexe de Mn2+ une sélectivité remarquable vis-à-vis du zinc, son principal compétiteur biologique. La différence de structure entre les complexes de Mn2+ (octa-coordinnée) et de Zn2+ (hexa-coordinnée) souligne l’adaptation du ligand à la taille légèrement plus grande du Mn2+, alors qu’il est trop gros pour le Zn2+. L’efficacité IRM du complexe MnL est ~30 % plus élevée que celle des systèmes typiques de Mn2+. Des études IRM in vivo dans des souris contrôles, même réalisées à une très basse dose (0.02 mmol/kg), indiquent un excellent signal et une élimination rénale. Pour la première fois, ce complexe combine stabilité, sélectivité, inertie et propriétés de relaxation inégalées, toutes de la première importance pour une application en IRM.

D. Ndiaye, P. Cieslik, H. Wadepohl, A. Pallier, S. Même, P. Comba, and É. Tóth, Mn2+ bispidine complex combining exceptional stability, inertness and MRI efficiency, J. Am. Chem. Soc. 2022, doi : 10.1021/jacs.2c10108
JACS spotlight sur cet article : https://pubs.acs.org/doi/pdf/10.1021/jacs.2c12719